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Social
Licenciement
Rédiger avec précision la notification d'un licenciement pour cause d'ivresse au travail
Être ivre sur son lieu de travail peut constituer une faute justifiant un licenciement, éventuellement pour faute grave selon les circonstances. Encore faut-il l’exprimer ainsi dans la notification du licenciement au risque de priver le licenciement de son fondement. Exemple avec une affaire dans laquelle l’employeur s’était contenté de faire état d’un « taux d’alcoolémie au-dessus de la normale ».
Ni alcool ni ivresse sur le lieu de travail
Alcool : restrictions autorisées. - Aucune boisson alcoolisée autre que le vin, la bière, le cidre et le poiré n'est autorisée sur le lieu de travail (c. trav. art. R. 4228-20).
L’employeur peut aller plus loin lorsque la consommation de boissons alcoolisées dans l’entreprise est susceptible de porter atteinte à la sécurité et la santé physique et mentale des travailleurs.
Il doit alors prévoir dans le règlement intérieur (à défaut, par note de service) des mesures permettant de protéger leur santé et leur sécurité et de prévenir tout risque d'accident. Dans ce cadre, l’employeur peut, notamment, restreindre ou interdire la consommation de boissons alcoolisées dans l'entreprise. Ces mesures sont valables sous réserve d’être proportionnées au but recherché.
À noter : en cas de contentieux sur la disposition du règlement intérieur, l’employeur doit être en mesure d’établir que cette restriction est justifiée et proportionnée, sans avoir cependant à faire état de risques qui seraient déjà survenus (CE 14 mars 2022, n° 43434).
Pas d’état d’ivresse. - Indépendamment de la question de l’alcool dans l’entreprise, l'employeur ne peut pas laisser entrer ou séjourner dans l'entreprise des personnes en état d’ivresse (c. trav. art. R. 4228-21).
Un maçon qui fait une chute, un test d’alcoolémie positif réalisé par la gendarmerie… et une lettre de licenciement mal rédigée
Un accident en état d’ébriété. - L’affaire jugée le 8 mars 2023 concernait un salarié maçon, victime d’un accident du travail le 19 juillet 2017, alors qu'il montait un mur sur un chantier (il avait chuté de la benne d'un camion sur laquelle il s'était posté pour travailler).
La gendarmerie s’est rendue sur place et a procédé à un dépistage de l'état alcoolique du salarié qui s'est révélé positif.
Licencié pour faute grave (notification le 3 août 2017), le salarié a ensuite contesté son licenciement devant le conseil de prud'hommes.
Lettre de licenciement motivé par l’alcoolémie du salarié. - Dans la lettre notifiant son licenciement au salarié, il lui était notamment reproché d'avoir « pendant [son] temps de travail, sur le lieu de travail, de surcroît en cours d'exécution de travaux en hauteur [..] travaillé en ayant un taux d'alcoolémie au-dessus de la normale ».
Dans la mesure où il lui était reproché d’avoir travaillé avec un « taux d’alcoolémie au-dessus de la normale » mais pas état d’ivresse, le salarié estimait qu’il n’avait pas commis de faute grave.
Attention à la rédaction de la notification. - La cour d’appel a validé le licenciement pour faute grave, estimant que le salarié avait contrevenu aux règles du règlement intérieur en travaillant en hauteur en état d'ivresse, alors qu’il avait un taux d'alcoolémie supérieur à la normale (résultat « objectivé par le dépistage d'alcoolémie positif »).
Mais, comme l’avait mis en avant le salarié dans son argumentaire, la Cour de cassation rappelle que la lettre de licenciement fixe les limites du litige des griefs que l’employeur énonce contre le salarié pour justifier son licenciement.
L’employeur doit motiver un licenciement, en énonçant dans la lettre de notification l’énoncé du motif ou des motifs invoqués (c. trav. art. L. 1232-1 et L. 1232-6).
Ici, la Cour de cassation relève que la lettre de licenciement ne visait que des faits d’exécution de travaux en hauteur avec un taux d'alcoolémie au-dessus de la normale, et pas le grief « d'exécution d'un travail en hauteur en état d'ivresse », que la cour d’appel ne pouvait donc pas retenir pour justifier le licenciement pour faute grave.
L’arrêt d’appel est donc cassé, et l’affaire devra être rejugée par la cour d’appel de Paris.
Rappel sur les alcootests dans l’entreprise |
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Ce n’était pas en cause dans cette affaire, mais rappelons que l’employeur qui souhaite contrôler l’état d’ébriété d’un salarié doit se reporter à son règlement intérieur, auquel il appartient d’organiser les modalités d’éventuels contrôles d'alcoolémie dans l'entreprise dans le respect des principes posés par la jurisprudence (les modalités du test doivent en permettre la contestation ; la nature du travail du salarié doit impliquer qu’un état d’ébriété est de nature à exposer les personnes ou biens à un danger). Si l’état d’ivresse est avéré, il peut constituer une faute justifiant un licenciement, voire un licenciement pour faute grave (cass. soc. 24 février 2004, n° 01-47000, BC V n° 60 ; cass. soc. 31 mars 2015, n° 13-25436, BC V n° 69). |
Cass. soc. 8 mars 2023, n° 21-25678 FD